La parentalité, souvent perçue comme un accomplissement et l'aboutissement d'un rêve, peut parfois se transformer en une source de mal-être profond. Fatigue, charge mentale, conflits entre enfants, le quotidien des parents est rarement un long fleuve tranquille. Il arrive des jours où l'on supporte plus difficilement ses enfants. Cet article explore les causes de ce sentiment, les solutions pour y faire face et les ressources disponibles pour les parents en difficulté.

Les défis de la parentalité

Devenir parent est une expérience transformatrice, mais elle est aussi jalonnée de défis. Fatigue, nuits écourtées, soucis d'alimentation, pleurs incessants, disputes dans la fratrie, difficultés scolaires, manque de participation, règles à répéter… La liste des challenges est longue. Dans la vie de famille, il est normal de rencontrer des coups de mou, des moments où le quotidien est plus énergivore et les enfants plus difficiles à gérer.

Admettre que l'on est dépassé : un premier pas crucial

Reconnaître que l'on est dépassé est une étape difficile, mais essentielle. « C’est quelque chose de très difficile à entendre par l’opinion sociale car la parentalité est censée nous épanouir, être synonyme de fierté et d’amour inconditionnel. On fait généralement bonne figure alors quand un parent ose dire qu’il n’y arrive plus c’est qu’il est suffisamment en souffrance pour s’autoriser à l’exprimer », constate Isabelle Roskam, docteure en sciences psychologiques et spécialiste de la parentalité.

Les causes du mal-être parental

Derrière cet aveu difficile se cachent des origines diverses.

  • L'épuisement émotionnel : Le parent peut ressentir un épuisement émotionnel intense dans son rôle parental. Il n’a plus d’énergie pour s’occuper de son enfant et se montre distant émotionnellement envers lui. Il assume les tâches quotidiennes, mais n’a pas envie de passer davantage de temps avec lui. « Les parents en burn-out ne se reconnaissent plus. Ils ne voulaient pas être comme ça. Souvent il s’agit de personnes hyperinvesties, qui ont toujours voulu faire de leur mieux pour être un bon parent mais qui n’en peuvent plus. Ils ne regrettent pas d’être parents mais sont en souffrance dans leur rôle », analyse Isabelle Roskam. Cet épuisement est profond et le sommeil ne suffit pas à le dissiper.
  • Le regret parental : Il s’agit du regret d’être devenu père ou mère. La personne a choisi d’être parent, mais réalise que sa vie aurait pu être différente et meilleure si elle n’avait pas pris cette décision. Elle n’avait pas réalisé que ce rôle lui prendrait autant d’énergie, de temps et inclurait autant de responsabilités. Elle peut penser que sa parentalité a nui à sa carrière professionnelle. « Ce n’est pas pathologique ni grave en soi. Cette prise de conscience peut aider à se comporter différemment dans le futur. Mais regretter l’existence d’un être humain, c’est différent de regretter d’avoir acheté un vêtement, il n’y a pas de retour en arrière. Le poids du regret est donc plus important. Il y a de la honte et de la culpabilité à l’exprimer », confie Isabelle Roskam.
  • Un trouble du comportement chez l’enfant : Le mal-être parental peut venir « d’un ou plusieurs enfants qui dysfonctionnent à un point tel que le parent ne sait plus quoi faire. Il est dépassé », précise la docteure en psychologie. L’enfant peut avoir des crises d’opposition, des troubles obsessionnels compulsifs (TOC), de l’hyperactivité, une grande agitation, des troubles du comportement alimentaire, des phobies… Le comportement de l’enfant peut participer aux difficultés exprimées par le parent. L’entourage a parfois assisté à ces moments de tension, d’agressivité et a pu s’en plaindre lui-même. A l’école, les professeurs peuvent le considérer parfois comme un mauvais élève ou un élément perturbateur.

Solutions et pistes pour aller mieux

Face à ces difficultés, il existe des solutions pour retrouver un équilibre et un épanouissement parental.

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  • Rompre l'isolement : Dans cette épreuve, il s’agit de s’autoriser à trouver une oreille attentive qui ne jugera pas. « Le piège, c’est de rester seul et de penser que l’on est un parent monstrueux. Dans les pays occidentaux, 5 à 8 % des gens sont en burn-out et plus de 10 % regrettent d’être devenus parents », estime Isabelle Roskam. Parfois c’est un ami proche, un membre de la famille qui offre cette écoute bienveillante. Mais cela peut aussi passer par un tiers. Isabelle Roskam et Moïra Mikolajczak forment des professionnels et les répertorient sur leur site www.burnoutparental.com/s-en-sortir. « Au bout de huit semaines, les parents retrouvent un épanouissement certain. Parfois ces échanges ont lieu en groupe et permettent de rencontrer d’autres parents confrontés aux mêmes difficultés », ajoute-t-elle. Dans une situation de regret, il n’est pas toujours nécessaire d’être pris en charge. Bien sûr, si cet état entraîne une grande souffrance parentale, il est préférable de se faire accompagner. Mais s’il s’agit d’un regret par rapport à son rôle et aux entraves qu’il a provoqué sur la vie professionnelle ou le manque de liberté, il est toujours bon de pouvoir en parler et se rappeler que ces difficultés sont passagères.
  • Gérer les situations de crise : Pour être en mesure de réagir calmement face à un enfant difficile, que l’on ne supporte plus, il y a plusieurs solutions. S’il s’agit d’un bébé, la première possibilité est de le mettre en sécurité et de partir s’isoler pour respirer profondément et lentement. Cela permet au papa ou à la maman de calmer son système nerveux. Avec un enfant plus grand, on peut s’appuyer sur la communication non violente (CNV) : on observe les faits « tu m’as mal parlé », on exprime son sentiment « je suis peinée et fâchée », on exprime son besoin « j’ai besoin de me sentir respectée », puis on formule une demande de manière positive « est-ce que tu peux me parler gentiment, s’il te plaît ? ».
  • Rééquilibrer son capital ressources : Pour traverser cette épreuve et aller mieux, l’idée est de se demander ce qui nous ferait du bien dans l’immédiat pour équilibrer son capital ressources et les facteurs de stress. « Avoir un enfant génère du stress, mais si on a assez de ressources pour y faire face, comme par exemple une coparentalité qui fonctionne bien et se répartit la charge mentale, des enfants qui contribuent tous, un entourage prêt à donner un coup de main, d’autres parents avec qui covoiturer, ça réduit les stresseurs et augmente les ressources », explique Isabelle Roskam. C’est cette balance qu’il faut maintenir en équilibre. Si on a tendance à être perfectionniste, à avoir un haut niveau d’exigences, à penser que ce sera mieux fait par soi que par les autres, prudence. On peut revoir ses objectifs et lâcher prise sur certaines choses. Certaines personnes apprécieront de faire une séance de yoga un après-midi, de passer un week-end seules pour prendre de la distance avec le quotidien, trouver du repos et de l’énergie, mais cela ne fonctionne pas pour tous et toutes. Surtout, ça ne doit pas être vu comme une injonction supplémentaire, dans un quotidien déjà chargé.
  • Se faire aider par des professionnels : Il est important de ne pas hésiter à consulter des professionnels de la parentalité, tels que des psychologues, des thérapeutes familiaux ou des coachs parentaux. Ils peuvent apporter un soutien précieux et des outils adaptés à chaque situation. De plus, si vous êtes à un stade avancé de burn-out, ces solutions NE VOUS SONT PLUS ACCESSIBLES. Rester dans votre isolement et tenter des choses glânées dans des livres ou des articles sans un soutien extérieur risque fort de renforcer le problème : si ça ne marche pas, cela ne fera que renforcer votre sentiment d’inefficacité : vos enfants n’en paraitront que plus ingérables, vous vous trouverez encore plus nul-le. En 1 mot comme en 1000 : faites-vous aider !

Le cas particulier des enfants difficiles

Il arrive que les difficultés soient exacerbées par le comportement de l'enfant. Un témoignage poignant illustre cette situation : "Je ne supporte plus ma fille de 8 ans. Elle est agressive, impolie, ingrate, egocentrique, colérique. J'ai une part de responsabilité evidemment la dedans. Certaines de mes blessures personnelles me poussent a anticiper tout ce que je peux, c'est instinctif. Je suis en hyper vigilance. J'ai verbalisé des tas de choses, nous montrons l'exemple, j'ai tenté de cultiver son empathie. Il y a tout de meme des regles, tout n'est pas permis et tout ne lui est pas dû mais je pense que je manque de constance sur l'application des regles. Quand on dit non c'est non, par contre, et on explique. J'ai jamais usé de chantage, je suis a l'écoute mais en fait je crois que je deteste être mère. C'est une prison affective. SES émotions prennent TOUTE la place. Je n' éprouve plus aucun plaisir aux moments en famille. J'ai une boule au ventre dès qu'elle rentre a la maison et dès qu'elle ouvre la bouche. Je suis hyperesthésique, et j'ai beaucoup de mal avec les fortes stimulations qui me provoquent des douleurs physiques. De plus, quelque chose me rend extremement vulnérable et altère ma capacité d'action. Je ne supporte pas les conflits, je souffre terriblement dès que ma fille vit quelque chose de désagréable ce qui m'empeche parfois d'être un soutien solide. Mes émotions me coutent beaucoup d'énergie, le quotidien aussi. J'ai la sensation d'être vraiment très patiente et a l"écoute et je suis persuadée que c'est son agressivité et son manque de considération pour les autres qui ont commencé a nuire a notre relation mais peut être que c'est le resultat d'un problème qui m'echappe. Je pense qu'elle fait de son mieux mais je suis dépassée."

Dans ce cas, il est crucial de :

  • Remettre en question ses propres réactions : La relation à votre fille réveille de toute évidence votre propre histoire. Et c’est sur cet aspect là que vous avez du pouvoir. Votre fille est le prolongement de vous même. Car, si vous ne faite pas ce travail, il en va de son équilibre psychique et de son avenir. Elle est en pleine construction et vous êtes son modèle.vous souffrez certes, mais c’est vous le parent. Démissionner intérieurement, serait un sacrilège !
  • Rechercher l'origine du comportement de l'enfant : Elle n'est pas comme cela par hasard. Par ailleurs vous ne parlez pas de son papa ? Etes vous séparée ? Je reste personnellement à votre disposition, sachant que ma première séance d'une heure est entièrement gratuite et sans engagement.
  • Consulter un thérapeute pour enfant : Il ne serait pas inutile de présenter votre fille à un thérapeute orienté sur les thérapies des enfants en complément de votre propre démarche pour faire un point sur ces ressentis.

Le couple et la parentalité

L'arrivée d'un enfant bouleverse l'équilibre du couple. Beaucoup de couples font la distinction entre les deux, et pensent que le couple conjugal doit s’effacer au profit du couple parental. « Mais ce dernier n’est pas négatif ! Il implique en revanche de nouvelles responsabilités et une nouvelle solidarité face à une vie de famille. Au début, il est tout à fait normal que les parents soient absorbés par le nouveau rôle qui leur incombe. Les premières années de Bébé sont comme un tsunami. C’est un bouleversement, entre le manque de sommeil, la place que prend l’enfant… Il faut se déculpabiliser même si on délaisse un peu son couple. Parfois, se défaire d’un couple amène à faire face à tellement de difficultés et une telle remise en question qu’il vaut mieux rester ensemble. L’important est d’être conscient qu’il y a un problème et de tenter d’améliorer les choses. «Les raisons principales que les patients évoquent dans mon cabinet pour ne pas se séparer sont la peur de faire souffrir les enfants, l’argent et l’image qu’ils vont renvoyer à la famille. Il y a aussi, même si c’est moins souvent avoué, la peur de rester seul. Ces raisons deviennent une montagne insurmontable quand il n’y a pas de profond conflit au sein du couple. Ils finissent par se dire qu’ils préfèrent rester ensemble », reconnaît la thérapeute. « De manière générale, les couples qui restent ensemble sont des couples qui fonctionnent malgré tout, au sein desquels il n’y a pas de mésentente particulière malgré la lassitude. Ils s’organisent comme une petite entreprise, se partagent les tâches et il n’y a pas de rupture dans la communication. En façade, tout semble aller bien.

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